Dans mes dernières notes, je vous vous ai montré les difficultés des botanistes,
à trouver une classification logique des végétaux.
Depuis le travail de Leonhart Fuchs,
il s’est passé 200 ans sans qu’aucun ne trouve la bonne solution.
Toutes les classifications proposées sont basées sur des ressemblances physiques,
utilitaires ou regroupées selon leur habitat.
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Carl von Linné
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Botaniste suédois né en 1707.
Il fait d’abord des études de médecine,
mais se passionne pour la botanique.
C’est à Uppsala (Suède), qu’il commence à concevoir sa classification des plantes,
basée sur les organes reproducteurs et les fructifications.
Il publiera “Systema Naturea” (les systèmes de la nature),
où il présente les minéraux, les animaux et les végétaux.
Concernant uniquement la botanique,
il publiera “Species plantarum” (les espèces de plantes),
où il décrit et nomme toutes les plantes connues en Europe.
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Sa classification des végétaux est simple mais méthodique :
– D’abord, il impose le latin, comme langue “officielle” des botanistes.
car les noms courants, changent d’un pays à l’autre et même d’une région à l’autre.
De nos jours, cette langue de référence est toujours utilisée,
ce qui est bien pratique quand on herborise à l’étranger.
– Ensuite, il va donner à chaque plante deux noms : un pour le genre et un pour l’espèce.
Exemple proche de chez nous :
Famille : conifères,
genre : Pinus (pin)
espèce : halepensis (d’Alep)
Le nom de l’espèce peut faire allusion à un caractère de la plante :
grandiflora (à grandes fleurs), alba (blanc),
à son pays d’origine :
Pinus halepensis (Pin d’Alep),
Cistus monspeliensis (Ciste de Montpellier)
ou, comme on l’a vu dans mes notes précédentes,
au nom du découvreur,
mais aussi pour honorer,
ou remercier, une personne qui a joué un rôle dans la botanique.
Le premier ouvrage français utilisant cette classification,
a été le “Catalogue des espèces cultivées dans le Jardin Botanique de Montpellier”.
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Une plante qu’il aimait particulièrement, porte son nom :
(Photo wikimedia)
La Linnée boréale (Linnaea borealis),
petite plante qui pousse dans les forêts de sapins de la zone boréale :
Canada, Laponie, certaines montagnes d’Europe.
Il y a quelques stations dans les Alpes où elle est rare et protégée.
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De nos jours, la classification de Linné est toujours employée,
même si des mises à jour interviennent fréquemment :
espèces, genres ou familles qui changent de nom,
nouvelles familles créées …
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Un exemple,
avec une famille de plantes qui poussent dans nos garrigues.
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Famille des Cistacées
8 à 10 genres, environ 200 espèces, surtout, sur le pourtour méditerranéen.
Caractéristiques communes :
– Arbrisseaux ou plantes herbacées souvent poilues ou velues.
– Feuilles simples souvent opposées, parfois collantes et persistantes.
– Fleurs à 5 pétales, frippés, délicats et éphémères.
– Fruits sous forme de capsules.
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Dans les garrigues de Lédenon, j’ai trouvé trois genres :
– Les Cistes,
– les Hélianthèmes,
– Les Fumanas .
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Les Cistes
– Arbrisseaux ou sous-arbrisseaux de 40 cm à 2 m, à fleurs grandes.
– Leurs fruits sont des capsules divisées en 5 à 10 loges.
Cistus albinus : Ciste blanc ou cotonneux
Ce sont les caractères des feuilles qui donnent le nom, car les fleurs sont roses.
Cistus monspeliensis : Ciste de Montpellier
Cistus salviiflorus : Ciste à feuilles de sauge
Si vous vous promenez dans la région de Générac,
vous aurez peut-être la chance de voir ce ciste, assez grand, avec de grandes fleurs,
maculées de rouge sang.
Cistus ladanifer : Ciste à gomme
dans la région du Vigan :
Cistus laurifolius : Ciste à feuilles de laurier
Vers l’Aude, l’Hérault, et même l’Espagne,
Cistus populifolius : Ciste à feuilles de peuplier
Sur les îles de la Méditerrannée : Crète, Chypre,
Cistus parviflorus : Ciste à petites fleurs
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Tous ces cistes poussent naturellement,
mais si vous allez chez les pépiniéristes, vous trouverez, en plus, des cistes hybrides.
Cistus x purpureus : Ciste pourpre
Cistus x purpureus “Alan Fradd” : la variété blanche du ciste pourpre
Cistus x hybridus var.corbariensis : Ciste des Corbières
et le plus beau :
Cistus x aguilari
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Les Hélianthèmes
– Sous-arbrisseaux ou herbes de 6 à 50 cm, à petites fleurs.
– Leurs fruits sont des capsules divisées en 2 ou 3 loges.
– Leurs étamines, nombreuses, sont toutes fertiles.
Helianthemum apenninum : Hélianthème des Apennins
Helianthemum salicifolium : hélianthème à feuilles de saule
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Les Fumanas
Presque les mêmes caractéristiques que les Hélianthèmes,
sauf en ce qui concerne les étamines et les graines,
différences qui sont difficiles à voir à l’oeil nu.
Je n’ai trouvé qu’une seule espèce aux Garrigues Basses de Lédenon.
Fumana thymifolia : Fumana à feuilles de thym
La photo du bas a été prise hier,
(on voit bien les capsules ouvertes qui ont libéré leurs graines)
celle du haut, au printemps dernier.
(Vous remarquerez une plante de thym , en fleur juste à côté,
et c’est vrai que les feuilles se ressemblent beaucoup).
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J’ai lu avec grand intérêt ces trois notes relatives aux noms des plantes. Il se trouve que je travaille dans ce plus vieux jardin botanique de France, grand carrefour de la recherche et du savoir, qui fut quelque part le berceau de la botanique moderne. Il n’est pas facile de passionner les foules avec un tel sujet, et pourtant bien raconté, comme vous le faites, avec l’aide de ces grands précurseurs qui furent tout sauf des savants ternes, la science prend vie, nous la montre, sans en occulter la magie. La botanique n’est pas une science froide, coupée d’une nature qu’elle dissèque, c’est une passerelle vers le vivant, où les noms ne sont jamais que des signes, et un jeu, de piste, qui nous ramènent d’où nous venons, mieux connaissant, plus reconnaissants.
D’abord, merci pour tous les compliments de votre dernier message.
Elève, je détestais la botanique …
On nous donnait un nom latin, et une fleur à disséquer pour connaître le nombre de pétales, sépales, étamines …
sans replacer la plante dans son contexte. Je n’y trouvais aucun intérêt.
Il a fallu que j’habite en garrigue, pour que je m’y intéresse.
Remarquer une plante, la voir vivre, connaître son milieu,
et seulement, ensuite chercher sa famille, son genre, son nom.
Exactement le chemin inverse, de celui qu’on nous apprenait à l’école…
La botanique des livres peut être très rébarbative,
si on ne l’applique pas au milieu vivant.
C’est ce que j’essaie de faire sur mon blog